Vif écho pour l’Apéro scientifique sur les biocarburants
Le mot de la fin dans la discussion sur les carburants: «Davantage d’efficience!»
Déjà son titre était sciemment provocateur: «Du sens et du non-sens des biocarburants». Le dernier Apéro scientifique de l’Empa à St-Gall abordait la question de savoir si les carburants produits à partir de matières premières renouvelables – dont la dénomination correcte est en fait carburants biogènes – sont une solution écologiquement, économiquement et politiquement sensée sur la voie de la mobilité neutre en CO2.
Jusqu’à récemment encore, les carburants produits à partir de matières premières renouvelables étaient considérés comme la panacée pour parvenir à une mobilité climatiquement neutre. Mais depuis qu’une pénurie alimentaire se dessine dans de nombreuses régions du monde – cela parce que, par exemple, le maïs n’est plus cultivé comme aliment ou comme fourrage mais pour produire de l’éthanol, l’image de ces soit-disants «biocarburants» a bien changé. Cela avec raison car, mis à part le fait qu’ils concurrencent la production alimentaire, tous les carburants biogènes ne sont de loin pas tous écologiquement sensés, ainsi que l’a révélé l’année dernière une étude réalisée par l’Empa. Un thème brûlant et controversé, ainsi que l’ont montré les deux Apéros scientifiques de l’Empa lundi dernier à Dübendorf et la semaine passée à St-Gall qui tous deux – cela malgré un temps invitant à la baignade et Euro 08 – ont réuni au total plus de 300 personnes. |
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Carburants produits à partir de déchets biogènes contre agrocarburants Il y a une année déjà, une étude d’écobilan réalisée par l’Empa sur mandat des offices fédéraux de l’énergie, de l’environnement et de l’agriculture a fait la une des médias. Rainer Zah, expert de l’Empa en matière de biocarburants et un des auteurs de cette étude, a en particulier abordé lors de ces apéros scientifques la question du rôle des carburants biogènes dans l’approvisionnement futur en énergie. Cette étude avait entre autres montré que dans la production des carburants biogène, c’était avant tout la culture des plantes qui influençait négativement leur bilan alors que les transports et la transformation jouaient dans cela un rôle moins important. Raison pour laquelle, selon Zah, ce sont avant tout les agrocarburants produits à partir de maïs, de pommes-de-terre et de céréales qui doivent être considérés comme nuisibles pour l’environnement. Toutefois, selon cet expert de l’Empa, il est possible de produire des biocarburants de façon durable et sans effet concurrentiel sur l’utilisation du sol. Pour les carburants produits à partir de déchets, par exemple, la culture de la matière première énergétique est supprimée. Et la culture de plantes énergétiques particulières telles que le Jatropha, une plante tropicale peu exigeante et riche en énergie de la famille des euphorbiacées, présente par comparaison un bon bilan écologique. De plus, comme le relève Zah, cette culture ne concurrence pas la production alimentaire si on utilise des sols qui ne peuvent pas servir à des fins agricoles. |
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Des biocarburants de la 2e génération pour une efficience énergétique accrue Mais des améliorations sont attendues dans la production des biocarburants aussi. Il existe déjà des différences considérables entre les biocarburants de la 1e et de la 2e génération: les premiers, qui sont déjà commercialisés, comprennent par exemple le biodiesel produit à partir du colza ou le bioéthanol produit à partir de la canne à sucre. Dans leur production, seule une partie de la plante de départ est transformée en carburant. Pour les biocarburants de la 2e génération, la transformation utilise une part plus importante de la masse végétale, ce qui permet d’utiliser aussi du bois ou des déchets comme matière initiale. Il devient alors possible, par exemple par un procédé de gazéification du bois non polluant, d’obtenir du méthane ou encore du carburant liquide BTL (biomass-to-liquid). Ainsi les biocarburants de la 2e génération présentent un écobilan nettement meilleur que ceux de la 1e génération. Pour assurer un approvisionnement en énergie à faibles émissions de CO2 et climatiquement neutre, il ne faut pas miser uniquement sur les carburants biogènes – aussi effciente que puisse devenir leur production, avertit Zah. «L’efficience énergétique et d’autres formes d’énergie renouvelables seront dans l’avenir au moins aussi importantes.» Une raison pour accroître par exemple encore nettement davantage que jusqu’ici l’utilisation de l’énergie solaire. |
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Les biocarburants, bouc émissaire de l’augmentation des prix alimentaires La primauté de l’importance de l’accroissement de l’efficacité énergétique sur celle de la production des biocarburants a aussi été soulignée par Lukas Gutzwiller de l’Office fédéral de l’énergie OFE qui a analysé le sens et le non-sens des biocarburants dans l’optique de la politique énergétique. «Les carburants biogènes ne sont que pour une faible part responsables de l’augmentation des prix des produits alimentaires. |
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Les causes réelles sont bien davantage des diminutions des récoltes dues à la sécheresse, des changements des habitudes alimentaires dans nombre de pays émergeants, le prix élevé du pétrole, des diminutions des réserves ainsi que, en particulier, la spéculation sur les marchés internationaux des matières premières agricoles.» Sur le plan de la politique énergétique, Lukas Gutzwiller a proposé d’introduire, aussi bien pour les biocarburants que pour la biomasse, une certification basée sur une directive sur les énergies renouvelables. Il a cependant voulu laisser encore ouverte la question de savoir si la Suisse devrait d’une manière générale promouvoir les biocarburants. Au lieu de cela il s’est joint au cœur des autres orateurs pour déclarer que «les biocarburants ne permettront pas de stopper le changement climatique, il faut accroître l’efficience énergétique !» La contribution de l’agriculture indigène à l’approvisionnement en carburant de la Suisse était finalement le thème qu’a abordé Heinz Hänni de l’Union suisse des paysans. Lui aussi a plaidé pour l’adoption d’une attitude plus «réaliste» dans cette discussion parfois échauffée. « Il y a deux ans, les médias et les mileux politiques étaient encore tout louanges pour les biocarburants» a-t-il rappelé. «Et depuis peu la bionergie est accablée comme responsable de la pénurie alimentaire.» A son avis, le potentiel indigène de production de carburants biogènes est de toute façon limité; même la conversion de la totalité des surfaces cultivables ne permettrait de couvrir que dix pour-cent des besoins de carburant. Nettement plus intéressante lui semble par contre l’idée que déjà six pour-cent de la surface agricole utile permettraient de couvrir la totalité de la consommation agricole suisse de carburant. Lors de ces deux manifestations, la discussion a été très animée et, surtout à St-Gall, quelques participants se sont exprimés de manière critique. Selon eux, il est incohérent de subventionner les biocarburant alors qu’il faudrait plutôt inciter les gens à moins rouler en voiture. A Dübendorf, un auditeur a demandé que l’on encourage d’autres modes de propulsion plutôt que de miser sur les biocarburants. |
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Informations Rédaction |
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